S’adapter à chaque étape de sa vie, à chaque changement d’orientation
Matthieu est un jeune homme de 26 ans. Son histoire est celle de beaucoup d’enfants en situation de handicap rare qui, à chaque changement d’orientation, au sortir de la petite enfance jusqu’à l’entrée dans l’âge adulte, se retrouvent dans un nouvel environnement inadapté, faute de place ou de structure existante répondant à leurs besoins.
Depuis son enfance, Matthieu présente des troubles complexes du langage avec des troubles associés. Pour se faire comprendre, outre le langage du corps, il utilise le français signé (signes issus de la LSF) et des pictogrammes à l’écrit.
Après quatre années d’accueil séquentiel en maternelle, Matthieu ne peut intégrer l’école élémentaire car l’acquisition du langage ne s’est pas faite. La recherche d’un établissement spécialisé s’impose alors à ses parents. Après maintes démarches, ils découvrent le Centre Daviel pour enfants plurihandicapés, attenant au Centre de Ressources Robert Laplane. Après une année d’attente, Matthieu intègre le centre Daviel jusqu’à ses 14 ans. Il y développe des capacités à communiquer via la démarche d’accès au sens et au langage spécifiquement pratiquée par les équipes pluridisciplinaires des deux Centres. Il progresse.
La suite de son parcours traduit les difficultés que lui et ses parents ont dû dépasser pour s’adapter continuellement aux orientations en décalage avec ses besoins d’accompagnement spécifique, lié à sa combinaison de troubles complexes : il sera accueilli dans un Centre pour jeunes sourds de 14 à 20 ans (Matthieu est entendant, mais pratique les signes de la LSF). Puis à l’âge adulte, au sein d’un Centre d’accueil de jour où il se rend aujourd’hui encore, parmi d’autres personnes aux profils et troubles variés. Si l’accompagnement est bienveillant, les parents de Matthieu reconnaissent que le choix du CAJ est un choix par défaut, inadapté à ses besoins. Car malgré le partenariat entre le Centre Robert Laplane et cet établissement, permettant des échanges réguliers autour de la situation de Matthieu et l’information des professionnels aux moyens de communication dont il a besoin, les choses ne progressent que très lentement.
Qu’en est-il alors de sa capacité à communiquer au cours de la journée ?
« Nos enfants sont des stars »: telle est la réponse de sa maman Muriel. Des stars car leurs capacités d’adaptation à des environnements inadaptés sont permanentes. On leur demande beaucoup, c’est épuisant.
Sur le plan physique, Matthieu a dû déployer également de gros efforts, ce qui lui a valu beaucoup de reconnaissance à la piscine municipale près de chez lui. Ses parents ont toujours cru en l’importance de l’activité physique pour rééduquer et apaiser son corps meurtri, blessé, encore douloureux et tendu aujourd’hui. Ainsi l’eau est devenue son élément, grâce à la persévérance d’éducateurs sportifs recrutés par ses parents qui lui ont appris à nager. Depuis, il se rend chaque semaine à la piscine pour un kilomètre de nage et beaucoup de complicité avec les autres nageurs du bassin qui l’ont vu gagner en confiance au prix d’efforts incroyables.
Aujourd’hui, le Centre de ressources Robert Laplane soutient activement le projet de création d’une structure innovante pour adultes en situation de handicap rare avec des troubles complexes du langage en Ile-de-France. Ce projet est porté par l’association AFHAR-TCL, association de familles au sein de laquelle les parents de Matthieu sont pleinement impliqués.